Hommage à Laurent Vidal et à ses actions
contre la mort subite chez le sportif
RIP Laurent Vidal
Dans la nuit du 9 au 10 novembre 2015, le jeune et talentueux triathlète Laurent Vidal s'en est allé à l'âge de 31 ans. ChronoMaîtres s’associe aujourd’hui à l'immense peine du monde du triathlon et adresse toutes ses pensées à sa famille, son entourage, ses amis triathlètes et ses fans.
Laurent Vidal, un homme de fer
Laurent Vidal, plusieurs fois champion de France de triathlon avait pris la 5e place aux JO de Londres et rêvait de briller à Rio où il aurait eu 32 ans, le plus bel âge pour cette discipline.
Mais voilà, le 24 avril 2014, Laurent a fait un arrêt cardiaque lors d’un entraînement de natation. Grâce à une intervention immédiate des secours, il avait pu être réanimé. Après 30 heures de coma et 3 semaines d’hospitalisation, il avait trouvé les ressources et l’optimisme pour rebondir. Mettant un terme à sa carrière de haut niveau, il s’était investi dans l’encadrement, dans des actions pour son sport et pour la sensibilisation contre la mort subite chez les sportifs.
Laurent Vidal, actif dans la lutte contre la mort subite
C'est dans le cadre de ses actions que j’ai découvert Laurent Vidal. C'était le 8 avril dernier à Courbevoie lors d'une conférence organisée par l’Association Numéro 14 dont le président fondateur est le père de Maxime Candau (Maxime, capitaine de l’équipe de France de Hand « jeune », a été victime en plein match de la mort subite à l’âge de 17 ans).
Parrainée par Teddy Riner, en présence d’Alain Calmat (Président de la Commission Médicale du Comité National Olympique et Sportif Français) et portée par nombreux sports (hélas ! pas de natation à ma connaissance), cette conférence avait pour objectif de sensibiliser sur la lutte contre les accidents cardiovasculaires liés à la pratique sportive.
Un témoignage poignant
Laurent Vidal y avait apporté un témoignage poignant un an après son accident cardio-vasculaire. Il était revenu sur cet accident intervenu en pleine pratique sportive, sur l’importance de l’intervention immédiate des premiers secours qui a permis de le réanimer, sur son rebond et sa philosophie de vie. Bien que sa carrière de haut niveau avait été stoppée nette, sa passion pour son sport était restée intacte. Laurent avait en effet continué à s’investir pleinement pour le triathlon et pas seulement puisque ses actions de sensibilisation s’étendaient aux autres sports comme ce fut le cas ce 8 avril.
Témoignage que vous pouvez retrouver dans l'article "La vie qui gagne" sur son blog.
Des sportifs pas toujours informés
Les sensibilisations sur les accidents cardiovasculaires des sportifs, sur les premiers secours ou sur les règles simples de la pratique sportive sont essentielles.
Pour l’anecdote, les 10 règles du sport rappelées lors de cette conférence n’étaient pas connues par l’un des 3 capitaines d’équipes de sports collectifs pro invités sur le plateau ; ce dernier avait même pris conscience qu’il avait une pratique dangereuse en ne respectant quelques unes de ces règles simples ! Ce moment de la conférence a souligné le fait que les règles de la pratique sportive ne sont pas mieux acquises pour le sportif lambda que pour le sportif de haut niveau.
La sensibilisation et donc la prévention contre les accidents cardio-vasculaires sont des actions indispensables à mener au quotidien, dans tous les sports et à tous les niveaux, ce que faisait Laurent Vidal et ce que font plusieurs associations dont l’Association Numéro 14 et qui devraient être appuyées par toutes les fédérations sportives.
Des stands de sensibilisation sur les compétitions de triathlon
Est-ce lié ou pas à l’action de Laurent Vidal, mais en accompagnant mon mari sur ses triathlons, j’ai pu constater cet été des actions concrètes menées par les organisateurs et:ou la fédération de triathlon. En juillet dernier par exemple, lors de la D2 organisée à Angers, j’ai pu voir pour la 1re fois, un stand de la Fédération de Cardiologie présente à côté de l’arrivée pour sensibiliser les triathlètes, leur encadrement et leur entourage : table de prospectus, intervenants disponibles pour informer, répondre aux interrogations des sportifs, insister sur l’importance des 1ers secours et former avec des démonstrations d’utilisation des défibrillateurs.
A quand un tel stand aux championnats de France Masters de natation ?
Peut-être bientôt compte tenu du partenariat entre la fédération de cardiologie et la FFN annoncé sur le site internet fédéral le 29 octobre dernier. A suivre !
La natation, un sport épargné ?
Jusqu’au décès du footballeur Marc-Vivien Foé en direct à la télévision lors d’un match avec son équipe nationale, la mort subite chez le sportif n’était pas connue du grand public et pas plus du monde sportif ; or, chaque année, ce sont 1500 à 2000 décès par mort subite pendant et jusqu’à une heure après la pratique sportive.
Vous pensez que la mort subite ne concerne pas les nageurs ?
- 23 octobre 2010 : Fran Crippen, nageur américain médaillé de bronze aux Mondiaux sur 5 km, est décédé à l’âge de 26 ans pendant la dernière manche de la coupe du monde d’eau libre 2010 !
- 30 avril 2012 : Alexander Dale Oen, nageur norvégien champion du monde et vice-champion olympique du 100 brasse a été retrouvé inanimé sous la douche alors qu’il effectuait un stage de préparation. Lui aussi n’avait que 26 ans.
Vous vous dites alors que ça ne concerne que les nageurs de haut niveau qui s’entraînent forcément trop intensément et vous pensez alors que les nageurs lambdas sont épargnés :
- 28 Mai 2015 à Merlimont dans le Nord Pas de Calais, un homme fait un arrêt cardiaque pendant une séance de natation en mer alors qu’il était accompagné par une autre personne.
- 29 Août 2015 à Trébeurden dans les Côtes d’Armor, un homme de 51 ans est décédé d'un malaise cardiaque alors qu'il nageait aux abords de l'Ile Molène en passant son diplôme fédéral de niveau 4 dans un groupe de 5 personnes suivi par un jury embarqué à bord d’un canot.
Vous vous dîtes alors que ce sont des cas particuliers en pleine mer dans des conditions pas toujours favorables et vous vous dites peut-être aussi que les masters ne sont ni nageurs de haut niveau, ni des nageurs non-entraînés et qu’en plus ils évoluent dans un milieu sécurisé, donc préservés.
- 24 Janvier 2015 à Louviers pendant la 2e journée Maîtres en Haute Normandie : un nageur C5 d’Andelle Natation fait un arrêt cardiaque en sortant de son 400 NL. Grâce à l’intervention immédiate des premiers secours et l’utilisation du défibrillateur il a pu être réanimé.
- 27 Mars 2015 à Rennes lors des championnats de France des Maîtres : tout le monde se souviendra de l’arrêt cardiaque du nageur C10 pendant son 100 papillon. Lui aussi a pu être réanimé grâce au massage cardiaque, l’utilisation du défibrillateur et l’arrivée très rapide des pompiers.
Les nageurs aussi concernés que les autres sportifs
Le 6 mars dernier, Pierre Camou, Président de la FF Rugby, accueillait au centre national de Marcoussis des sportifs de tous horizons pour lancer et leur présenter un plan de prévention contre la mort subite chez le sportif, initié par le Pr Israël.
Selon les chiffres de 2006, la natation apparaissait en 4e position parmi les 25 sports où les sportifs de haut niveau ont été touchés par la mort subite.
Documents à lire :
> Plan de prévention et de lutte contre la mort subite du sportif lancé par le PDMS du 91
> Acte du colloque sur la mort subite non traumatique liée aux activités physiques et sportives
Comment agir pour lutter contre ce problème de santé publique ?
Lors de la conférence du 8 avril à Courbevoie, il a été pointé du doigt les différences de suivi médical et de prévention d’une fédération sportive à une autre, en France.
L’Italie, quant à elle, a pris à bras le corps ce problème de santé publique en imposant un électrocardiogramme à tous ses sportifs licenciés à partir de 12 ans (il faut savoir que 60 % des anomalies peuvent être détectées par cet examen médical). En 10 ans, les décès par mort subite pendant la pratique sportive ont été réduits de 90% en Italie.
En France, de nombreuses associations sont très actives dans le domaine de prévention et de sensibilisation avec des actions efficaces :
- l’Association Numéro 14 avec des conférences, des présences, une communication, une diffusion massive des règles des cardiologues du sport et des démonstrations sur le massage cardiaque et l’utilisation du défibrillateur.
- l’association SPORT (Surveillance Prévention Orientation Recherche Terrain), le PDMS du 91 lancent des projets de lutte contre la mort subite chez le sportif avec des actions concrètes de suivi médical et de formation aux premiers secours.
- la ligue contre la cardiomyopathie, l’association française des maladies héréditaires du rythme cardiaque et l’association du Syndrome de Brugada se sont associées pour organiser des WE sport afin d’encadrer la pratique du sport dans le cas d’anomalie ou d’aryhtmie cardiaque. L’arrêt du sport est contre productif, la pratique régulière, légère et non intensive permet de limiter les risques.
- la ligue contre la cardiomyopathie reverse les dons pour la recherche médicale sur les maladies cardiaques.
- Sport protect permet de protéger la santé des sportifs et de préserver l'intégrité des compétitions
- etc.
En résumé
Personne ne devrait mourir à cause de la pratique sportive ! "Le sport absolument, mais pas n'importe comment", Association Numéro 14.
Trois points essentiels permettent de lutter efficacement contre ce problème de santé publique. Il s'agit :
- d'avoir une pratique saine en respectant les 10 règles du sport > des affiches présentes lors de championnat et meeting pourraient les rappeler de temps en temps ;
- de se former aux premiers secours (tant les sportifs que l’entourage et l’encadrement) > des sollicitations pourraient être faites auprès de la fédération de cardiologie ou d'associations pour tenir des stands lors des meetings et championnats ;
- d'avoir un contrôle médical avec ECG régulier pour détecter les anomalies cardiaques.
Le mot de la fin pour Laurent Vidal
En mémoire de Laurent Vidal et pour que ses actions et ses messages se poursuivent...
Extrait de son témoignage après son accident d'avril 2014 :
« C’était une journée comme les autres. Le matin, je suis parti faire du vélo, et après la piscine, en soirée, je voulais aller courir. Je le sais parce qu’en rentrant chez moi après l’hôpital, j’ai retrouvé les affaires préparées dans mon scooter. » Avant que bascule ce jeudi 24 avril. « J’ai eu la chance que ça m’arrive à la piscine, j’étais entouré. Ça aurait pu être en mer, ou quand je cours en forêt. Le message que je veux passer, c’est que tout le monde sache faire le massage cardiaque qui s’apprend en vingt minutes ! Et que tout le monde puisse faire contrôler son cœur. »